Prisées pour la valeur de leur rostre, les cinq espèces de poisson-scie sont parmi les plus menacées de la planète et figurent sur la liste rouge de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN). L’association Des Requins et Des Hommes, membre de France Nature Environnement, se mobilise pour lutter contre le commerce illégal de rostres de poisson-scie notamment en France et a obtenu en octobre dernier une première victoire juridique. Un juge a en effet procédé à la confiscation d’un rostre vendu illégalement sur internet par un brocanteur.
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Poissons-scies : des espèces menacées, prisées pour leur rostre
Les poissons-scies sont des raies de la famille des Pristidae qui peuvent atteindre jusqu’à 7 mètres de long pour 600 kg. Munis d’un rostre (museau allongé pourvu de dents) composé de 15 à 30 dents latérales lui servant à capturer leurs proies, les poissons-scies sont particulièrement vulnérables aux filets maillants et chalutages. Ils habitent les eaux tropicales côtières et fréquentent des habitats de mangroves. Victimes de la valeur de leur rostre au marché noir, les poissons-scies sont considérés parmi les élasmobranches (requins, raies), comme ceux qui sont le plus menacés. Les cinq espèces de poisson-scie sont inscrites au plus haut niveau sur la liste rouge de l’IUCN. Elles sont également listées à la convention de Washington (CITES) régissant le commerce international d’espèces menacées au même titre que l’ivoire d’éléphant. Ainsi, toute vente de tout ou partie de cette espèce est donc rigoureusement interdite. Pourtant, un véritable marché de contrebande subsiste notamment en France. France Nature Environnement, au côté de l’association Des Requins et Des Hommes, se bat pour mettre fin à ce commerce illégal notamment par des actions juridiques qui commencent à porter leurs fruits.
Première victoire juridique dans la lutte contre le marché noir de rostres
L’association Des Requins et Des Hommes, soutenue par France Nature Environnement Pays de la Loire et Sauvegarde de l’Anjou, a entrepris une action juridique fin 2014 contre un professionnel brocanteur proposant à la vente un rostre de poisson-scie. Une plainte commune a été adressée aux services de la police de la nature (ONCFS) du Maine-et-Loire, les trois associations se portant partie civile. Après plusieurs mois d’instruction, la culpabilité du brocanteur a été reconnue en octobre dernier et le juge a procédé à la confiscation du rostre. Une première victoire pour les associations membres de France Nature Environnement qui ne comptent pas s’arrêter là. En effet, le projet MEsR-Scie, développé par l’association Des Requins et Des Hommes, qui consiste à répertorier les ventes illégales de rostres de poisson-scie a dénombré jusqu’à 130 ventes illégales de rostres par an en France !Les professionnels de la vente et les sites Internet de négoce doivent désormais prendre leurs responsabilités afin de mettre un terme à ces trafics.
Développer et soutenir des programmes de recherche et d’éducation pour mettre fin à ce trafic
Afin de mieux protéger les espèces sur leur zone de répartition, des programmes de recherche et d’éducation auxquels participe l’association Des Requins et des Hommes se développent. Le programme Africasaw a par exemple pour objectif d’améliorer les connaissances sur la distribution actuelle des poissons-scies entre la Mauritanie et la Sierra Leone et de s’impliquer auprès des communautés de pêcheurs côtiers pour créer un réseau d’alerte en cas de capture accidentelle. Un travail de longue haleine qui commence à payer : de plus en plus de pécheurs relâchent ainsi dans les eaux des poissons-scies capturés. France Nature Environnement demande que la France soutienne les programmes de recherche et d’éducation afin de lutter contre le trafic de rostres de poisson-scie qui sévit en France.
Pour Armelle Jung, chargée de projets scientifiques à Des Requins et Des Hommes : « Les poissons-scies sont, à l’instar des requins, des garants de la richesse des océans dont de nombreuses populations côtières dépendent pour leur sécurité alimentaire. L’existence en France de ce commerce illicite a des répercussions déplorables sur les efforts de préservation de la biodiversité marine entrepris en Afrique de l’Ouest. Il importe d’agir en concertation pour former, informer et faire respecter les conventions internationales ».
Pour Denez L’Hostis, président de France Nature Environnement : « L’excellent travail mené par les associations du mouvement France Nature Environnement a permis de mettre en lumière l’existence d’un commerce illicite de rostres de poissons-scies en France. Nous appelons les citoyens à dénoncer ces pratiques qui mettent en danger ces espèces et par voie de conséquent tout un écosystème ».