Par jugement du 19 février 2024, le tribunal correctionnel d’Angers a condamné plusieurs sociétés agricoles pour des arrachages de haies ayant entraîné la destruction et l’altération de l’habitat d’espèces protégées à Challain-la-Potherie. Une décision qui montre que, malgré l’extrême faiblesse de l’exécutif face aux démonstrations de force d’une partie des représentants de la profession agricole, toutes les institutions de notre pays n’ont pas perdu de vue l’enjeu de préservation des haies.
Le 16 février 2021, un arrachage de haies abritant des espèces protégées (Chouette effraie, Grand capricorne) est constaté par des agents de l’Office Français de la Biodiversité à Challain-la-Potherie. Le gérant des sociétés agricoles concernées (M. Laurent Cellier) s’était pourtant vu opposer un refus d’arrachage de ces haies au titre de la conditionnalité des aides de la politique agricole commune. Des poursuites sont engagées par le parquet d’Angers et, après plusieurs renvois, l’affaire est jugée le 19 février 2024.
Le tribunal correctionnel d’Angers juge le prévenu et ses différentes sociétés agricoles coupables de destruction et altération d’habitats d’espèces protégées. Il les condamne à diverses peines d’amende, une peine de prison avec sursis, la remise en état des lieux et la réparation du préjudice des associations environnementales constituées parties civiles (FNE Pays de la Loire, FNE Anjou et la LPO Anjou).
Cette décision intervient dans un contexte de remise en cause des réglementations protectrices des haies par une partie de la profession agricole : celle-ci fait en effet du droit de l’environnement le bouc émissaire de ses difficultés pourtant liés à de multiples facteurs dont la dépendance aux intermédiaires (industries agro-alimentaires, grande distribution…) et l’absence de régulation des échanges internationaux. Incapable de maintenir un cap clair en faveur des haies dans ce contexte de crise agricole instrumentalisée par la FNSEA, le Gouvernement a laissé entendre qu’il allégerait ce cadre réglementaire protecteur des haies. Il avait pourtant lancé en septembre 2023 un Pacte en faveur des haies, actant l’importance de l’enjeu de mettre un coup d’arrêt à leur destruction.
A rebours de ces hésitations de l’exécutif, ce jugement vient réaffirmer l’importance de l’enjeu de préservation des haies dont la disparition très rapide (70 % en 50 ans) contribue à l’érosion catastrophique de la biodiversité (perte de 60 % des effectifs d’oiseaux de milieux agricoles en 30 ans). Elle vient également saluer le travail des agents de l’Office Français de la Biodiversité, dont la qualité des investigations a été vantée par les magistrats lors de l’audience. De leur côté, nos associations continueront à porter plainte et se porter parties civiles lorsque de tels faits seront commis.